La Russie célèbre ce mardi 9 mai le « jour de la victoire » sur l’Allemagne nazie, un jour après la plupart des pays occidentaux. Mais cette année, dans le contexte de la guerre en Ukraine, les festivités sont réduites et la sécurité renforcée.
Moscou célèbre la victoire un jour après la plupart des autres pays occidentaux où les festivités avaient lieu le 8 mai. « La capitulation allemande a été signée à Berlin dans la soirée du 8 mai. Et il était avec le décalage horaire minuit passé à Moscou. On était déjà le 9 mai. Donc, techniquement, effectivement, Moscou est en droit de célébrer le 9 mai, explique Andreï Kozovoï, professeur d’histoire russe et soviétique à l’Université de Lille, joint par Margaux Ratayzyk.
« Mais rien n’empêchait Staline à l’époque, poursuit-il, de considérer qu’il aurait été plus judicieux de célébrer la victoire avec l’ensemble des autres alliés. Il a dès le départ choisi de faire séparément pour des raisons idéologiques, parce qu’il voulait marquer la distance avec les alliés occidentaux, pour leur dire en quelque sorte : nous sommes, nous les Russes [les Soviétiques], les principaux artisans de cette victoire. Nous avons donc droit à une journée de victoire à part. »
Pour la Russie, c’est donc le jour J, mais dans le contexte de la guerre en Ukraine, ces célébrations ont bien sûr une signification particulière, d’autant que l’« opération spéciale » – comme l’appelle encore le Kremlin – avait pour objectif officiel de « dénazifier l’Ukraine ».
Sécurité renforcée
Mais après 15 mois d’offensive en Ukraine, l’armée russe apparaît affaiblie par les pertes, les revers et les tensions entre l’état-major et les paramilitaires de Wagner. Elle reste enlisée dans son combat pour la prise de la ville de Bakhmout, épicentre des combats de l’est depuis des mois.
Le président Vladimir Poutine est isolé et visé par un mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale. Les commémorations se déroulent aussi sous protection renforcée du fait de la multiplication des attaques en territoire russe attribuées à Kiev par Moscou. Elles se produisent alors qu’une vaste contre-offensive ukrainienne est annoncée depuis des semaines comme imminente.
L’attaque la plus spectaculaire a été une frappe de deux drones contre le Kremlin la semaine dernière, que Moscou n’a pas hésité à qualifier de tentative d’assassinat contre Vladimir Poutine. L’Ukraine a démenti tout rôle dans cette opération.
Défilés annulés
Dans les régions proches de la frontière ukrainienne, les défilés traditionnels avaient déjà été annulés ou réduits, les deux drones ont encore alourdi l’ambiance. Les festivités sont également annulées dans des régions plus à l’est.
À Moscou, la grande parade militaire en présence de Vladimir Poutine a bien eu lieu, même si la traditionnelle marche du « Régiment des Immortels » qui rassemble des dizaines de milliers de Russes dans les rues de la capitale a été annulée. Lors de cette manifestation patriotique populaire, les Russes qui le veulent marchent avec un portrait d’un membre de leur famille tué dans la Seconde Guerre mondiale. L’année dernière, ce sont des portraits de soldats morts eu Ukraine qui avaient été brandis. Selon les réseaux sociaux, le pouvoir aurait souhaité éviter un étalage possible de très nombreuses victimes dans ce conflit. Le Kremlin souhaite évidemment mettre à l’honneur des combattants des territoires annexés.
« On sait que Vladimir Poutine éprouve évidemment une grande inquiétude par rapport à un risque d’attentat qui le viserait, analyse Andreï Kozovoï. C’est un défilé sous haute surveillance, plus encore que d’habitude, et un défilé où tout triomphalisme ou tout parallèle entre la guerre actuelle et la guerre en Ukraine, encore plus que l’année dernière, serait mal venu. » Pour la première fois, aucune image des répétitions du défilé moscovite, dimanche dernier, n’a été diffusée sur les télévisions d’État. Le déroulé est totalement confidentiel.
Rfi