Vinrent la parole droite, la parabole elliptique et le serment d’honneur
Arrivèrent les héros hissés sur le trône de la parole donnée
La peur n’habite pas le héraut porte-bonheur du siècle maudit
Enfant du Continent primordial le courage au combat est sa vertu
Sa vie s’estompe brusque lorsque son honneur est profané
Ombres et lumières, voix et silences accompagnent saccadés les héros
Connaissez-vous un empereur prestigieux qui ne soit pas un tyran
Des rois à la voix douce, le glaive ensanglanté, ont des greniers débordants de mil,
Le pouvoir comme l’autorité tient par la violence le peuple soumis
Avez-vous vu, assis sous l’arbre à palabre, le sage savant
Il égrène, généreux, ses messages, graines de savoir, qui germent
Hommes et femmes notre monde bobine le fil blanc de l’histoire habillée
L’épopée de notre Humanité que nous tissons solide,
Pagne qu’ornent les trophées de notre mémoire emplie de partis pris
Lorsque Yéro Mama apparut la bravoure s’habillait de courage
Et, au son du hoddu, elle se parait reluisante d’honneur
Nos savanes abritaient des monstres qui arrachaient nos filles en offrandes
Arriva Samba Guéladio Diégui bel homme téméraire qui coupa la tête du GuInarou
L’Afrique, terre vierge, habitée de noirs que la lumière du soleil rendait invisibles
Découverte d’hommes blancs qui ne connaissaient d’hommes que blancs
Le fusil, la poudre et le canon furent le balluchon du pèlerin maléfique
Le conquérant vorace dévora insatiable or, ivoires, bois et esclaves
Il dévala les vallées, escalada les collines, ses navires remontèrent les fleuves
Il fit patiemment du noir fier, l’ennemi de son frère nègre jaloux
La trahison s’installa diffuse dans les cours royaux désunis
Nombreux furent les preux chevaliers qui offrirent leurs vies gages de leurs dignités
Je chante le Burba Jolof Alboury Ndiaye qui combattit jusqu’au Niger
Son fusil à la main, il mourut, son corps dispersé ensemença la terre de Dosso
J’appelle les flûtes du Fuuta Jalon, au son altier, déclamer El Hadj Omar Foutiyou Tall
Son parcours héroïque le plongea, sans retour, dans les montagnes de Bandiagara
De la verte Guinée jusqu’au Cap Vert que l’Océan n’a pas fini d’avaler
J’entends toujours cassants les vers incandescents du poète de l’Afrique libre
David Diop partagea son savoir avec la jeunesse de la Guinée qui osa dire NON
Sa voix portée par la brise marine, au bord de la plage de Yoff, elle exhorte au refus
Dans l’antre de la métropole parisienne, Lamine Senghor décline son manifeste
De la forêt casamançaise, fine gazelle noire, la pipe rebelle, surgit Aline Sitoé Diatta
Le colonisateur effaré pensa enfermer le droit à la vie libre à Tombouctou
Les décennies sont passées, la fille de Cabrousse continue d’inspirer la jeunesse
La plume est liberté, l’écriture est signe de vie
Le livre est un sillon que trace solitaire l’écrivain, messie des temps modernes
L’écrivain exhorte inlassablement le peuple à emprunter le chemin tracé
Ousmane Sembène accompagne le peuple africain dans la voie du combat libérateur
Boubacar Boris Diop désenvoûte les corps de la malédiction génocidaire
Il prouve que nos langues sont d’égale dignité littéraire que le français, l’anglais, …
Je proclame le poing levé, le sourire découvrant mes dents blanches
Que les vrais héros tirent leur force de leur puissance infinie à imposer la paix
Que la violence est la preuve manifeste de la faiblesse du tyran
Quel homme fut Nelson Mandela qui tendit la main, donna la joue à ses geôliers
Il rétrécit le fossé entre les blancs, les noirs, les indiens et les métis
Le dialogue par la voie de la justice et de la réconciliation écarta la guerre civile
Sous le feu de la case en flamme, les femmes héroïques de Nder s’immolèrent
Pour que le maure ne les asservit pas, leurs corps se consumèrent dans les cendres
Qui se dispersèrent aux quatre points cardinaux portés par des vents généreux
Adolescent, j’ai su Telli Diallo mourir de soif et de faim, dans l’abominable Camp Boiro
Nous nous bâtîmes, sans échos, car un autre peul ne devait plus mourir d’être peul
En face, de l’autre côté de l’Atlantique, sur le continent américain, au Chili
Ses mains atrocement martyrisées, Victor Jara fut fusillé
Aujourd’hui encore ses chants, sa musique résonnent à travers la Pampa
Aucune arme n’a le pouvoir d’assassiner la liberté, la justice et les droits des peuples
Aussi vraie qu’aucune main ne peut arrêter les vagues
Le savoir est l’arme infaillible contre l’ignorance et la tyrannie
Et la connaissance porte le flambeau de l’honneur de l’esprit humain
Thierno Moussa Camara de Ganguel, érudit encyclopédique
Il décrivit avec précision la vaccination contre la peste bubonique par les peuls
Il fit l’étude sociopolitique des régimes politiques dans le Fouta
Homme de sciences, de sciences sociales et de sciences humaines
Ses écrits critiques demandent du courage aux universitaires qui les étudieront
Lorsque la matière devint énergie, que l’atome provoqua l’hécatombe d’Hiroshima
Albert Einstein, inventeur de la formule magique « eu-égale-m-c-deux »
Qui écrite sur le papier, donna diaboliquement en pratique la bombe atomique
Le savant averti se démarqua de cette spirale du mal et devint le chantre de la Paix
Devant les toilettes pour blancs et les WC pour personnes de couleur
Surgit une femme noire, magicienne du calcul des trajectoires des satellites
Ses chiffres, ses graphiques inspiraient confiance aux astronautes blancs
La tyrannie du racisme la maintint des années durant inconnue des Américains
Enfin, les rideaux se levèrent, ils laissèrent apparaître au grand jour
Le visage vieilli de Katherine Coleman Goble Johnson
La NASA fut éclairée de sa couleur écarlate
Le savoir est l’ultime expression de l’honneur et de la dignité humaine
Quel est le prix du savoir
Sans aucun doute, l’honneur de sa reconnaissance suffit
Grigori Perelman, le mathématicien solitaire de Leningrad
Déclina, sans hésitation, tous les prix qu’il reçut
Car la découverte scientifique n’a pas de prix
La reconnaissance des pairs devrait combler le découvreur de bonheur
Jeunes gens, la créativité au service de l’Humanité n’a pas de prix
Le bonheur que procure la communauté des connaisseurs
Lorsqu’ils valident votre création n’a d’égal que la dignité qu’elle vous confère
Mary Teuw Niane