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ASER : l’intelligence d’une nomination (par Moustapha Diakhaté)

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C’est un joli coup d’œil audacieux, presque un clin à toute la jeunesse du Sénégal qui constitue presque 65% de notre population de 18 millions d’habitants. La nomination de Jean Michel Lat Ndam Sène, un ingénieur de moins de 30 ans à l’ASER (Agence sénégalaise d’électrification rurale), dix ans de moins que la moyenne d’âge, est une vraie gageure.

Notre population est très jeune et le nouveau DG de l’ASER à 30 ans est déjà senior selon l’actuelle pyramide des âges. Avec notre classe politique fossilisée, le nouveau DG de l’ASER peut être considéré comme un jeune, ce qui est loin d’être le cas, le Président Léopold Sédar Senghor n’avait-il pas en son temps surpris son monde en nommant au poste de gouverneur de la région de Kaolack un administrateur civil avec presque le même âge que l’actuel DG de l’ASER.

En piochant dans notre très vaste diaspora, le Président de la République et son chef de gouvernement ont trouvé une rare pépite au parcours hybride : ingénieur avec une immersion professionnelle et surtout des projets de recherche futuristes dans l’énergie et la mobilité.

Au-delà de l’agence chargée de l’électrification rurale, les autorités anticipent avec cette nomination la transition énergétique et la mobilité électrique en plein essor. Il est très loin donc du surdiplômé classique – bardé de diplômes – souvent âgé sans l’empreinte et la qualification professionnelle précises.

Dans son parcours déjà si riche, l’étape d’ingénieur d’application reste le graal. Il collabore comme praticien et chercheur avec le CEA (Commissariat à l’Énergie Atomique), EDF (Électricité de France), la DGA (Direction Générale de l’Armement), et Orano – acteur nucléaire – c’est l’étape où il est initié au 3D, au big data et l’informatique quantique en prélude l’intelligence artificielle.

Il trouve ainsi sa place au cœur du système énergétique français – le 1er en Europe avec son parc nucléaire – en pleine recomposition avec l’accélération de la transition énergétique. Il est exposé aux nouveaux métiers et process que nos formations classiques – ici en Afrique – n’ont pas suffisamment pris en compte, la mise en place des réseaux convergents et intelligents est encore balbutiante faute de production électrique suffisante et d’investissement sur les réseaux.

Heureusement sur le continent, notre pays caracole en tête avec plus de 70% pour la pénétration rurale de l’électricité, et 95% pour les zones urbaines, ce qui accélère le dépérissement progressif de l’ASER au profit de concession d’électrification rurale plus opérante et des ERILS. Dans cet objectif, son parcours transversal et hybride pourra aider l’agence à opérer sa mue. Le gaz dont notre pays est si riche va lubrifier cette mutation dans le secteur de l’électricité qui sera reconfiguré en segments métiers autour de la production ; du transport et de la vente-distribution.

Il est presque établi que même un appel à candidature n’aurait abouti à un choix aussi judicieux pour l’ASER tant le parcours du natif de la petite est si brillant, presque taillé sur mesure face aux challenges auxquels fait face l’agence, c’est d’ailleurs toute l’intelligence de cette nomination.

Aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre d’années.

Moustapha DIAKHATE

Expert en Infrastructure et Politique Energie

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